The Room, un Silent Hill en demi-teinte

Ce jeu, je l’ai fait à sa sortie, mais pour rien au monde je n’y rejouerais. Avec Silent Hill 4 : The Room (dernier épisode développé au Japon par l’équipe d’origine), la série culte de Konami pousse l’horreur psychologique très loin en s'attaquant directement à la santé mentale du joueur.

The Room a connu un certain succès commercial et critique, mais reste considéré par beaucoup de joueurs comme le vilain petit canard de la quadrilogie originale. Trop dur, frustrant et surtout trop éloigné des 3 premiers jeux, Silent Hill 4 est effectivement une œuvre à part dans sa conception même du jeu vidéo. 

Silent Hill 4 The Room

Pourquoi ça rend fou?

Petit récap’ indispensable pour comprendre le concept de Silent Hill 4 : Henry se réveille dans la “Room 302”, un appartement dont la porte d’entrée est condamnée. À travers le judas, il peut observer les allées et venues de ses voisins, pour qui la vie continue normalement. Henry fait un rapide tour du propriétaire, et découvre que son carreleur a merdé : Il y a un énorme trou dans le mur de sa salle de bain, qui mène tout droit vers un monde parallèle infernal. 

Silent Hill 4 est un jeu hybride, où le héros n’aura de cesse d’aller et venir entre son appartement et le monde parallèle. L’appart, présenté en vue à la première personne, est un hub sécurisé où il peut se reposer, sauvegarder, gérer son inventaire, et surtout “stalker” sa voisine. Une fois passé à travers le trou, on retrouve le gameplay typique de Silent Hill : Une vue à la 3ème personne dans monde alternatif truffé de créatures horribles et d’énigmes. 

Silent Hill 4 Door

Je trouve ce concept assez efficace en termes d’ambiance. Le monde réel, même cloisonné dans ce tout petit appartement, tisse des liens avec l’horreur qui se cache de l’autre côté du trou. Depuis sa fenêtre, Henry voit par exemple une jeune femme qui descend dans une station de métro. Plus tard, dans “l’autre monde”, il va tomber nez à nez avec cette même femme, qui se croit dans une sorte de rêve, en total déni du danger qui l’entoure. Gros malaise! 

Hélas, ce double gameplay ne va pas sans poser quelques problèmes : Tout d’abord, on passe sa vie à faire des aller/retour!!! Pour sauvegarder, évidemment, mais aussi pour vider son inventaire de tout le matos qu’on ramasse dans l’autre monde. Car contrairement aux 3 premiers Silent Hill, l’inventaire est ici limité, et notre héros se retrouve à gérer des munitions, armes, potions… comme dans un Resident Evil. Sauf qu’ici, il n’y a qu’une seule “safe room”, et chaque voyage dure une éternité. Le simple fait de traverser le trou et de sortir de la salle de bain pour accéder au point de sauvegarde entraîne une multitude de chargements qui plombent le rythme. 

Autre grand changement, Silent Hill 4 est plus orienté “action” que ses prédécesseurs. Les contrôles sont plus nerveux, et notre personnage est en principe plus fort que James, Heather ou Harry… Le problème, c’est que les développeurs ont eu la main lourde sur les monstres : ils nous tombent littéralement sur la gueule à chaque couloir. Dans les espaces les plus vastes, on se retrouve à batailler contre 5 ou 6 foutus chiens zombis… et ce n'est pas une partie de plaisir! Si Henry est assez doué pour se déplacer, on ne peut pas en dire autant de sa capacité à se battre. L’auto-lock fait souvent n’importe quoi, les monstres “annulent” nos attaques quand ils frappent, ce qui fait qu’on se prend parfois 2 ou 3 coups avant de pouvoir riposter ou même fuir. 

Silent Hill 4 The Room Gameplay

Côté scénario, c’est un bordel sans nom. Je n’ai jamais été très doué pour démêler les intrigues des Silent Hill, et cet épisode m’a paru encore plus obscur que les précédents. Le trip “rassemble 36000 post-it pour comprendre l’histoire” m’a vite découragé. Heureusement, l’ambiance fait le job, et certains niveaux sont très oppressants. Le jeu y va aussi de son lot de séquences chocs et bizarres (La tête... un grand traumatisme adolescent), qui restent en mémoire longtemps après avoir éteint la console. 

Le compositeur Akira Yamaoka livre une O.S.T. à l’image du jeu, avec des grands moments (la sublime valse “Nightmarish Waltz” et la chanson d'intro “Tender Sugar”), et hélas beaucoup de remplissage/recyclage. Je trouve aussi le chant de Mary Elizabeth McGlynn plus envahissant que sur les 2 jeux précédents. Ces titres pop/rock apportaient une cassure stylistique intéressante à Silent Hill 2 et 3, mais ici je trouve qu’il y en a juste trop. 

Un jeu en quête d'identité?

Je suis très mitigé sur The Room. L’ADN de Silent Hill est là, mais dilué dans un jeu bien trop creux et laborieux. Et d'ailleurs, où est la ville? Avec son enfilade de lieux (métro, forêt, orphelinat…) balancés à la chaîne comme de vulgaires niveaux, le jeu oublie complètement son sujet principal. Adieu les ruelles brumeuses et le plaisir de l’exploration… Si j’étais méchant, je dirais que c'est à la fois un mauvais jeu vidéo ET un mauvais Silent Hill, dans le sens où il n’assure même pas le minimum de fan-service. 

Pour finir sur une note moins négative, je trouve que le tout début du jeu est quand même très prenant. Si je n'avais fait que les 2 premières heures, sans tout le calvaire qui suit, j'aurais adoré The Room. Se retrouver totalement isolé du monde dans cet appartement mystérieux, avec comme seule issue un passage vers l'enfer, ça fout quand même un sacré frisson! La relation avec Cynthia est aussi bien construite et développée. Tout n'est donc pas à jeter, mais ça fait quand même léger quand on arrive juste après 3 grands classiques du jeu vidéo.

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